mercredi 2 novembre 2011

Merci

Seule, elle parcours ce monde. Son monde.
Hormis elle, il n'y a personne, excepté ces farouches guerriers qui se battent inlassablement dans le canyon. Quelques fois elle va les voir, prend part au combat ou les observe juste d'en haut, assise sur un rocher.
Elle passe le plus clair de son temps dans la plaine enneigée, seule dans ce monde blanc, à ressasser le passé.
Quand ça va mal, elle file dans la forêt ténébreuse, qui jouxte le canyon. Là bas, les bruits de combat s'estompent laissant place au désespoir le plus profond, aux sentiments les plus noirs.

Elle passe ainsi de nombreuses année ainsi, alternant les différents mondes selon son humeur.

Puis un jour elle aperçoit une silhouette. Surprise, elle se rapproche doucement. Un homme grand et svelte, les cheveux long couleur argent se tient dans la pleine. Il se retourne et la voit. Elle panique et s'enfuit.
Il lui court après en vain, elle se réfugie dans la forêt.

Pendant une longue période, elle l'évite, s'enfuit dès qu'elle le voit. Il essaye de la rattraper avant de se résigner. Elle connaît bien mieux ce monde que lui. Ainsi, il prend le temps de faire le tour de ce monde étrange, sans plus se soucier de la jeune fille.

Finalement elle le rejoint alors qu'il est assis sur un rocher, au dessus du canyon. Elle reste un long moment debout à côté de lui sans parler.

-Qui es-tu et qu'est-ce que tu fais là?
-Je m'appelle Shadow. Et je ne sais pas ce que je fais ici. On est où?
-Devant la canyon.
-J'avais vu, mais on est où? Je veux dire quel est le nom de ce monde?
Elle le regarde sans comprendre.
-Laisses tomber. Tu t'appelles comment?
Elle hausse les épaules.
-Pourquoi se battent-ils ainsi? Ils ne s'arrêtent jamais?
-Je ne sais pas. Leur lutte est sans fin. Il n'y a jamais de gagnant.
-Mais ne manquent-ils pas d'hommes au bout d'un moment?
-Non. Tu veux venir voir de plus près?
-Non merci.
-Tant pis!
Elle s'élance dans le sentier, sa robe blanche virevoltant derrière elle. Il la regarda se battre aux milieux des épéistes, son rire cristallin couvrant le brouhaha de la bataille.

Quelques jours plus tard, ils se retrouvent dans la plaine enneigée. Elle, assise en tailleurs, lui couché ses mains derrière la tête. Aucun d'eux ne semblait souffrir du froid.
-ça fait combien de temps que tu es ici?
-Je ne sais pas. Depuis toujours je crois.
Il se redresse sur un coude, l'air étonné.
-Toute seule? Tu n'as jamais eu personne avec toi?
-Non, tu est le premier.
-Et ben! ça n'a pas du être facile tous les jours.
-J'ai l'habitude, tu sais. J'ai toujours été seule alors cela ne me dérange pas. Par contre, j'ai été surprise en te voyant la première fois. Comment es-tu arrivé ici?
-Je ne sais pas. Je ne me souviens pas.
-Tu ne pourras pas repartir alors? Ta famille et tes amis vont s'inquiéter.
-Possible. Je ne me souviens pas en avoir eu. Et toi, tu n'as pas d'amis ou de famille?
-Non. Je te l'ai dis, je suis seule.
-C'est dommage je trouve.
-Tu peux parler, toi aussi tu es seul!
-Non. Tu es là.
Elle se tourne d'un bloc vers lui, ses yeux flamboyant de colère.
-Je ne suis pas là pour toi!
Avant qu'il n'est pu esquisser le moindre geste, elle s'enfuit vers la forêt, ses joues ruisselantes de larmes.
Il ne cherche pas à la rattraper, cela ne servirait à rien. Il soupir et se recouche.

Elle ne ressort pas de la forêt avant une semaine. Abrutit, effondrée, anéantie, elle déambule sans but, dans la neige.
L'apercevant, il va lentement à sa rencontre pour ne pas l'effaroucher. Arrivé près d'elle, il la prend dans ses bras.
-J'ai cru que tu t'étais perdue!
-C'est impossible.
-Qu'est-ce qu'il t'arrive?
Elle se libère de son étreinte avant de reculer de quelques pas, tournant la tête, les yeux baisser.
-Rien. C'est normal.
-Comment ça, normal?
Elle secoue la tête et se dirige vers la guerre perpétuelle. Elle s'arrête un instant pour regarder les combattants avant de les rejoindre, un sourire étirant ses lèvres.

Plusieurs années passent sans grand changement. Ils discutent beaucoup, apprennent à ce connaître. Il ne va jamais dans la forêt, elle lui est interdite. Elle y va souvent, ressortant toujours dans un état lamentable. Il est toujours là pour l'attendre lorsqu'elle sort.
Ils commencent à s'apprécier, se considérer comme amis.

Dressée en haut du ravin, la jeune fille regarde la guerre. L'homme la rejoint et se place silencieusement à côté d'elle. Il l'a attendue près d'un mois devant la forêt. C'est la première fois qu'elle y restait si longtemps.
Elle prend la parole d'une voix douce, nimbée de tristesse.
-Tout ça n'existe pas, n'est-ce pas?
-Oui.
-C'est moi qui ai créé ce monde.
-Oui.
Elle se tait à nouveau, le regard perdu au loin.
-Je ne sais plus quoi faire.
-Prends ton temps. Rien ne presse.
Elle secoue la tête. Tout cela n'a que trop durer. En face d'eux, la forêt s'efface lentement. Une larme roule sur sa joue. Elle reste silencieuse.
En quelques heures, il ne reste de ce monde, que le rocher sur lequel ils sont.
-Qu'est-ce qu'on va devenir?
-Je ne sais pas. C'est à toi de voir.
Elle se retourne lentement, le visage ruisselant de larme.
-Toi aussi je t'ai inventé, n'est-ce pas?
Il acquiesce lentement, plongeant son regard dans le sien.
-Alors toi aussi tu vas disparaître?
-Je le crains.
Elle secoue la tête.
-Non! Non, je ne veux pas!
-Il le faut pourtant.
-Je ne suis pas prête!
-Je crois que si.
Il s'éloigne d'un pas. Elle le rattrape par le bras.
-Attends! Reste encore un peu. Juste un peu.
Il se retourne et lui adresse un sourire. Il se rapproche d'elle, jusqu'à ce qu'elle sente son souffle sur son visage.
-Tu ne peux pas partir comme ça.
Il hoche la tête.
-Je... Je t'aime.
Il se penche vers elle. De sa main il lui caresse la joue avant de la passer dans ses cheveux. Il l'attire contre lui et l'embrasse tendrement.
-Tout ira bien maintenant.
Il recule de quelques pas, sans la lâcher des yeux. Il lui adresse un dernier sourire avant de disparaître.

Elle reste figée, sans pouvoir détacher son regard de l'endroit où l'homme a disparut.
Shadow. Elle ne le reverra plus, si ce n'est dans ces souvenirs.
Elle se remémore tous les moments passé avec lui. Malgré ses larmes et sa tristesse, elle sourit. Il a raison, tout ira bien maintenant. Elle a tournée une page. Il faut qu'elle avance. Elle regarde droit devant elle et murmure :
-Merci, Shadow

5 commentaires:

  1. un jour il faut laisser le monde imaginaire derrière soi et affronter le monde réel... mon monde imaginaire s'est effacé peu à peu, je ne l'ai pas vraiment vu venir.

    joli texte en tout cas ;-)

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  2. @ annick : je sais, mais c'est dur des fois!

    @ Poopine : Merci!

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  3. C'est un texte émouvant .En ce moment tu nous ponds des trucs sombres mais beaux .Continue comme ça !

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